Rupture totale à Montagny

Il aura fallu trois assemblées pour que les comptes 2012 de Montagny soient acceptés. Combien en faudra-t-il pour que le budget 2014 passe la rampe?
Jeudi soir 19 décembre, 181 citoyens avaient fait le déplacement pour cette très attendue assemblée du budget qui prévoyait une hausse de l’impôt sur le revenu et la fortune des personnes physiques de 83,6% à 95% et du taux de la contribution immobilière de 1,5 à 3 pour mille. D’entrée de jeux, dans une salle des Arbognes pleine à craquer, un citoyen a souhaité que les deux demandes soient votées séparément. Ce qui a été accepté par 123 citoyens.

Descente aux enfers
Le conseiller communal responsable des finances, Mauro Maimone, a expliqué la situation boiteuse de la commune. Le déficit du budget 2013 était de 339?303?francs. Sans augmentation d’impôts, le budget 2014 arrivait à une perte de 819?723?francs, pour un total de charges de plus de 7,5 millions de francs. La barre fatidique des 5% de déficit était donc allègrement franchie. Avec la hausse d’impôt et de contribution immobilière souhaitées par l’Exécutif, le déficit était ramené à 59?750?francs, soit le 0,8% de l’ensemble des recettes.
Mauro Maimone et l’administrateur Christophe Burri nourrissent l’assemblée d’informations sur cette déconvenue financière. On notera au passage le transport des élèves qui passe de 2000 à 35?000?francs; 35?456?francs de plus pour les services sociaux; les frais d’accompagnement en EMS augmentent de 40?984?francs, sans oublier les rentrées fiscales qui fondent comme neige au soleil. Le boursier a expliqué, à l’aide d’un tableau comparatif, que Montagny avait des charges nettes inférieures à la moyenne cantonale par habitant. Par contre, concernant la moyenne de revenu, la commune de 2200 habitants se classe au 163e?rang sur 165 communes.
Si jusque-là l’assemblée se déroulait plutôt dans le calme, la suite prendra la tournure d’une descente aux enfers. De nombreux citoyens font leurs remarques. L’un d’entre eux arrive même avec des transparents et sa propre comptabilité. «Il faut faire des économies et pas des compromis», argumente-t-il. «Avez-vous vraiment fait un budget d’austérité. Inspirez-vous de ces citoyens qui vous montrent l’exemple», appuie un autre habitant.
«Le maximum a été fait. Nous devons prendre une décision pour notre avenir. Le but c’est d’arriver à un équilibre pour apporter encore des services valables à nos concitoyens», répond le syndic Hubert Oberson.
D’un coup, le ton monte sérieusement. «Quel type de personnes voulez-vous accueillir dans notre commune», clame une citoyenne excédée.
«Je ne sais pas ce qu’on peut faire de plus. Vous avez des tas d’idées, venez au Conseil communal», rétorque le vice-syndic Fabien Bachmann.
Un autre citoyen s’emporte et estime qu’il faut supprimer un salaire d’employé communal et distribuer des travaux aux entreprises de la place.
«Nos employés exécutent la plupart des travaux eux-mêmes. Prendre des privés reviendrait plus cher», répond le syndic. «Menteur, menteur, t’es à côté de la plaque!» entend-on dans une salle en ébullition. «S’attaquer à des employés communaux, ça me met hors de moi», répondra plus tard une autre personne.
Retour à la réalité avec une commission financière favorable à cette augmentation d’impôts. Il est plus de 21?h?30 et c’est l’heure d’un premier vote, celui de la hausse de l’impôt, ratiboisée par 141 non (22 oui). De même pour la contribution immobilière avec 147 non (21 oui). Le Conseil communal est désavoué, une fois de plus, dira-t-on.


Pas de solution miracle
Dans un indescriptible cafouillage où une chatte n’y retrouverait pas ses petits, la commission financière revient à la charge par son président Patrick Neuhaus. «Nous proposons une alternative pour un budget acceptable. Mais il n’y a pas de solution miracle. Le risque c’est de repasser par une hausse des impôts dans deux ou trois?ans». Il est alors proposé un taux à 92,6% au lieu de 95% et une contribution immobilière de 2,5 pour mille au lieu des 3 pour mille proposés. Le déficit passerait alors à 260?000?francs, soit 3,5%. Au vote, la proposition est à nouveau balayée par 142 refus (40 oui tout de même).
A 22?h?15, c’est l’impasse. «Que voulez-vous?» lance alors un vice-syndic plutôt remonté. «De toute façon, même si vous proposiez une baisse d’impôt elle ne passerait pas», lance un citoyen au fond de la salle, prouvant par-là le fossé abyssal creusé au fil des mois, entre l’Exécutif et ses concitoyens.
«Vous voulez un budget d’austérité? Votre Conseil communal a regardé tout ceci. En supprimant toutes les aides aux sociétés, repas d’aînés, réception de jeunes citoyens, en coupant dans l’entretien des routes, on arrive à 140?000?francs d’économie. C’est encore bien au-delà des 5% exigés», explique la nouvelle conseillère communale Chantal Genetelli.
«Nous payons aussi des impôts et nous sommes tous propriétaires. Nous ne sommes pas sept Winkelried en face de vous. On a cherché des solutions. La confiance est rompue, je prendrai mes dispositions», appuie le conseiller Daniel Gendre. «Vous nous prenez pour des nuls et c’est regrettable», ajoute encore le syndic.
C’est un véritable clash. Il est 22?h?40 lorsque le syndic groggy décide de mettre un terme à une assemblée communale hors norme. Fixant un prochain rendez-vous en février ou mars 2014.
Nul doute que cette soirée aura des répercussions et il ne serait pas surprenant que de nouvelles démissions interviennent au Conseil communal.