Bisbille sur l’aide financière au tabac

«Nous recherchions un arbitre, nous avons peut-être trouvé un coach.» Président de l’association Broye Tabac, réunissant les tabaculteurs de la Broye vaudoise et fribourgeoise, Fabrice Bersier a conclu par cette boutade, samedi dernier à la grande salle de Corcelles-près-Payerne, l’intervention de l’invité, Philippe Leuba. Au cours d’une assemblée revenant sur une année 2013 moyenne (voir encadré ci-contre), de nombreux planteurs ont manifesté leur courroux face à la convention de soutien direct à la production, proposée par la SOTA, société coopérative d’achat du tabac indigène (voir ci-dessous). Dernier intervenant de la journée, le conseiller d’Etat a soulevé un tonnerre d’applaudissements en proposant une séance dès le lundi suivant pour faire pression sur les industriels, représentés par la SOTA.

Pas d’aide à plus de trois hectares cultivés
«Nous sommes heureux de constater que l’industrie souhaite donner des perspectives d’avenir à la tabaculture en Suisse, mais nous avons appris que la convention ne traiterait pas équitablement tous les producteurs, ce qui serait préjudiciable pour toute notre corporation. Nous sommes donc opposés à ce projet dans sa forme actuelle», s’est exprimé Florian Savary au nom de plusieurs planteurs de la région. Dans les faits, les producteurs plantant plus de 3 hectares d’herbe à Nicot ne pourraient pas bénéficier de cette aide.
«C’est diviser pour mieux régner», se sont insurgés plusieurs intervenants, soulignant que les plus grosses exploitations ont davantage contribué à l’évolution d’une culture toujours prospère. Selon eux, cette norme aurait été choisie pour obtenir une majorité de justesse à ce projet. En effet, 55% des producteurs broyards et 66% au niveau helvétique seraient ainsi gagnants.
«Nous sommes conscients que ce n’est pas idéal, mais cette solution est la moins mauvaise», relevait Eric Rapin, président de SwissTabac. L’association faîtière nationale aurait souhaité une aide pour tout le monde, mais cela serait contraire à la loi sur les cartels. «L’un de nos soucis principaux était de stabiliser le nombre de planteurs, voire même de susciter des vocations», ajoutait Francis Egger, secrétaire de l’association. Une brèche dans laquelle la SOTA s’est glissée pour établir sa proposition, laquelle n’est pas négociable aux yeux des industriels.


Solidarité entre planteurs mise à mal
«On se traite de partenaires, mais entre partenaires il nous semblerait logique de pouvoir participer aux modalités de discussions, s’énerve Fabrice Bersier. En cassant une solidarité bien établie entre tous les planteurs, ce scénario proposé met à mal toute la famille des planteurs.» Mais face au risque de voir l’aide proposée lui passer sous le nez en cas de refus, SwissTabac est finalement entrée en matière en octobre dernier, tout en souhaitant encore pouvoir modifier cette convention.
Des changements que les paysans espèrent obtenir grâce au soutien du pouvoir politique. «Je ne vous promets pas d’y arriver, mais je m’engage à en parler avec les top managers des industries tabacoles ayant leur siège dans le canton de Vaud, lançait Philippe Leuba en incitant les producteurs à rester unis. Cette culture est insignifiante au niveau suisse, mais d’importance pour le canton. Parfois, on doit négocier avec ces entreprises, si une fois on peut leur demander quelque chose en contrepartie, on ne va pas se priver.»

    Plus d'infos dans notre édition de la semaine